Benzène

expositions professionnelles

Le saviez-vous ?

Le benzène est classé par le CIRC comme cancérogène avéré pour l’homme (Groupe 1) sur la base de leucémies observées dans des études épidémiologiques et animales.

L’inhalation est la voie principale d’exposition au benzène.

Ses sources d’émission sont les processus de combustion (dont le tabagisme), le transport routier, et les activités industrielles.

Entre 5 et 18% des leucémies seraient dues à une exposition professionnelle au benzène. Les employés les plus exposés sont ceux travaillant dans la fabrication, le transport ou l’utilisation de benzène, dans l’utilisation de carburants automobiles, et ceux manipulant du benzène pur (laboratoires).

Les tableaux 4 du régime général et 19 du régime agricole reconnaissent (avec d’autres maladies hématologiques) les leucémies et le syndrome myéloprolifératif en tant que maladies professionnelles suite à une exposition au benzène.

Présentation

A température ambiante, le benzène se présente sous la forme d’un liquide incolore à l’odeur douce et sucrée. C’est un hydrocarbure aromatique monocyclique provenant de la combustion incomplète de composés riches en carbone. On le produit aujourd’hui en grande quantité en raffinant industriellement du pétrole afin de l’utiliser comme matière première dans la fabrication de substances chimiques. Ce toxique volatil résulte aussi d’activités de combustion (gaz d’échappement du transport routier, tabagisme, chauffage au bois, utilisation de bougies, d’encens, etc) et le transport routier. Sa tendance à s’évaporer favorise son émission par des produits et matériaux dont il est un composant, parfois sous forme d’impuretés : essence, matériaux de construction, etc.

  • Production et utilisations du benzène

    On produit en France 900 000 tonnes de benzène par an (INERIS, 2006). Il est utilisé notamment dans de nombreuses synthèses chimiques (encres, peintures, colles…). Dans le passé, des expositions professionnelles importantes ont été observées dans les secteurs de la chaussure, du caoutchouc, dans la chimie et l’imprimerie. Intermédiaire de synthèse de nombreux produits de base, il entre aujourd’hui dans la composition de marchandises fabriquées dans des secteurs industriels variés : élastomères, résines, colorants, pesticides, produits pharmaceutiques, détergents, dissolvants (Décret 2001-97, 2001), etc.

  • Voies d’exposition, organes cibles, effet cancérogène du benzène

    Le benzène

    L’inhalation est la voie principale d’exposition au benzène : on estime que 90% de l’exposition en résulte. On évalue à 50% l’absorption du benzène par inhalation ; il est ensuite rapidement distribué dans le corps. Le benzène peut également être absorbé rapidement par voie digestive. La voie cutanée est une source secondaire d’exposition qui concerne surtout le milieu professionnel (HCSP, 2010).

    La cible du benzène est le système hématopoïétique : moelle osseuse, tissu lymphoïde, production de globules rouges, de globules blancs, de plaquettes…. L’exposition au benzène peut entraîner des effets aigus et chroniques (c’est-à-dire qui persistent dans le temps), cancérogènes ou non. L’atteinte de la moelle osseuse constitue le premier signe d’une toxicité chronique susceptible d’évoluer vers une leucémie.

    Les propriétés cancérogènes du benzène sont connues depuis longtemps. Le CIRC le classe parmi les cancérogènes avérés pour l’homme (groupe 1) sur la base de leucémies observées dans des études épidémiologiques et animales (CIRC, 1982). Le niveau de preuve est estimé suffisant pour deux formes de leucémies à évolution rapide : la leucémie myéloïde aigüe et la leucémie aigüe non lymphocytaire (Fontaine, 2009). Il est par contre limité pour le myélome et le lymphome malin non hodgkinien (Alexander 2010, Kane 2010). Le rôle du benzène dans le cancer de la thyroïde est débattu du fait d’études ayant montré des résultats positifs dans le secteur de la pétrochimie (AFSSET, 2009).

    Les substances incluant du benzène et leur effet cancérogène

    Le CIRC a aussi évalué la cancérogénicité de plusieurs produits ou substances incluant du benzène. C’est le cas du tabagisme actif et de la fumée du tabac considérés cancérogènes avérés pour les cancers de la moelle osseuse (leucémie myéloïde) (groupe 1, volume 100E, 2009). De même, il classe en groupe 1 les émissions en milieu clos dues à la combustion domestique de charbon (volume 100E, 2009) et en groupe 2A (substances probablement cancérogènes) celles de la combustion domestique de biomasse (le bois, essentiellement) (volume 95, 2010) : les fumées émises par les poêles et cuisinières à charbon ou à bois et les cheminées contiennent en effet des composés cancérogènes tels que du benzo[a]pyrène, du formaldéhyde et du benzène (Afsset, 2009).

  • Expositions extérieure et intérieure de la population générale

    Le benzène est présent à la fois dans l’air extérieur et l’air des lieux clos.

    Milieu extérieur

    Dans l’air extérieur, ce sont les secteurs résidentiel et tertiaire qui en sont la source d’émission principale (74,7% en 2008), en particulier du fait de la combustion du bois. Le transport routier constitue le second contributeur aux émissions dans l’air ambiant (15,2%) (CITEPA, 2010 ; Observations et statistiques de l’environnement, 2011). A noter également la présence de benzène à proximité des stations service.

    Lors de sa campagne nationale de mesure de la qualité de l’air intérieur dans un échantillon de logements représentatif du parc des logements français (2003-2005), l’Observatoire de la qualité de l’air intérieur (OQAI) a mesuré les concentrations en benzène dans l’air extérieur auprès de 517 logements. La médiane des concentrations en benzène était inférieure à la limite de quantification égale à 1,1 µg/m3 (Kirchner 2007).

    Milieu intérieur

    La pollution intérieure contribuerait de manière importante à l’exposition de la population au benzène, du fait du temps passé par la population dans les bâtiments. Une étude réalisée en 2000/2001 auprès d’une centaine d’adultes franciliens travaillant dans le secteur tertiaire à Paris a ainsi attribué l’exposition (par inhalation) au benzène de cette population à 50% au domicile, 32% au lieu de travail et 18% aux déplacements domicile/travail (Ademe, 2001). Lors de la campagne nationale logements de l’OQAI, les concentrations en benzène dans 541 logements et 139 garages attenants ont été mesurées. La médiane des concentrations en benzène dans la chambre principale (ou pièce assimilée) était égale à 2,1 µg/m3 (Kirchner, 2007).

    Dans les lieux clos, le benzène résulte cependant à la fois des sources intérieures et du transfert de la pollution atmosphérique notable dans les agglomérations et zones industrielles. Les niveaux de pollution intérieure seront ainsi d’autant plus élevés que le bâtiment sera proche du trafic routier, de raffineries de pétrole ou d’usines utilisant du benzène (Brosselin, 2009).

    Les sources propres aux lieux clos sont variées : les combustions domestiques telles que le tabagisme, la cuisson des aliments, le chauffage des locaux hors chauffage électrique, ou l’utilisation de bougies et d’encens (Ademe, 2005 ; HCSP, 2010) ; divers produits (matériaux de construction et d’ameublement, produits de bricolage et d’entretien) présents dans l’environnement intérieur sont également susceptibles de contenir du benzène, en dépit de son classement en CMR1 et des limitations de son usage dans les produits d’entretien et les matériaux mobiliers et de construction. On ne peut pas exclure qu’il soit totalement écarté des processus de production, stockage et transport de ces matériaux (HCSP, 2010). Le benzène fait en effet partie de ces composés organiques volatils (COV) qui s’évaporent à température ambiante et contaminent l’air. (Afsset, 2009).

    Populations vulnérables et sensibilité au benzène

    Les jeunes enfants pourraient présenter une vulnérabilité plus grande que celle des adultes face à l’inhalation de benzène car leur fréquence respiratoire et leur pourcentage d’absorption sont plus grands. La sensibilité au benzène dépend, également de la consommation d’alcool, qui potentialise les effets du benzène sur le système hématopoïétique (Nakajima, 1985), ainsi que du patrimoine génétique, de l’état de santé général et du statut nutritionnel (Afsset, 2008 ; HCSP, 2010)

  • Exposition professionnelle au benzène

    Il existe de nombreuses maladies dues à l’exposition au benzène qui sont reconnues en tant que maladies professionnelles. Cette fiche s’intéresse exclusivement aux cancers liés à une exposition professionnelle au benzène.

    Métiers à risque et recommandations

    D’après l’enquête SUMER 2003 réalisée à l’initiative du ministère de l’Emploi, 0,3% des salariés étaient exposés au benzène (hors exposition professionnelle aux carburants) en 2003 (DARES, 2006). Les principaux secteurs concernés sont

    • la fabrication, le transport et l’utilisation du benzène dans l’industrie pétrolière, chimique et pétrochimique ;
    • l’utilisation du benzène pur dans les laboratoires ;
    • l’élaboration, le transport, la distribution et l’utilisation des carburants automobiles (mécaniciens automobiles, pompistes, chauffeurs, livreurs, etc) ;
    • l’exposition des bûcherons et des ouvriers sylviculteurs a été estimée très modérée, le tabagisme apparaissant comme facteur confondant (INRS, 2007).

    Concernant les risques des travailleurs des parcs de stationnement couverts, un rapport d’expertise collective de l’Anses conclut que le benzène est l’une des 2 principales substances (avec le dioxyde d’azote) à l’origine des risques liés aux expositions chroniques dans ce milieu (Anses, 2010). Maintenance, entretien, surveillance et accueil constituent les activités les plus exposées. Plusieurs recommandations ont été émises, parmi lesquelles :

    • la réduction des activités impliquant la présence de travailleurs dans des espaces ayant une qualité d’air insuffisante,
    • la diminution de l’exposition des travailleurs dans les activités indispensables au bon fonctionnement des parcs (réduction de la présence humaine),
    • l’évaluation et l’amélioration de la qualité de l’air.

    Cancers professionnels liés au benzène

    Plusieurs études ont mis en évidence une association entre exposition professionnelle au benzène et l’apparition de leucémies : les employés ayant été exposés au benzène présentent un risque augmenté de développer une leucémie myéloïde aigüe ou une leucémie lymphoïde chronique (Khalade, 2010). Entre 5 et 18% des cas de leucémies seraient dues à une exposition professionnelle (INCa, 2010).

    Le tableau 4 du régime général de la sécurité sociale reconnait les leucémies aiguës myéloblastiques et lymphoblastiques (à l’exclusion des leucémies aiguës avec des antécédents d’hémopathies) et les syndromes myéloprolifératifs en tant que maladie professionnelle si le travailleur a été exposé pendant au moins 6 mois. Le délai de prise en charge est de 20 ans. De même, le tableau 19 du régime agricole considère les leucémies et le syndrome myéloprolifératif, le délai de prise en charge étant réduit à 15 ans et l’exposition devant avoir duré au moins 1 an pour les leucémies.

    Au sujet des doses d’exposition, l’INRS pointe le pouvoir leucémogène (c’est-à-dire sa capacité à induire des leucémies) du benzène pour des expositions « extrêmement variables » (<1 à >100 ppm). Une relation dose-effet entre l’importance de l’exposition (ppm/mois) et l’incidence des leucémies a été mise en évidence, mais cette relation reste imprécise et une dose-seuil éventuelle n’a pas pu être définie (INRS, 2007).

  • Réglementation

    Limitations de l’usage du benzène

    La vente et l’emploi du benzène sont strictement réglementés. Depuis 2001, le benzène et les préparations en renfermant plus de 0,1 % en poids ne doivent pas être mis à la disposition du public (usage contrôlé réservé aux professionnels) (Décret 2001-97, 2001). En milieu professionnel, il est interdit d’employer des dissolvants ou diluants renfermant plus de 0,1 % en poids de benzène sauf lorsqu’ils sont utilisés en vase clos (INRS, 2007).

    Des additifs au benzène ont remplacé le plomb toxique dans l’essence en Europe. Sa présence y est cependant limitée à un taux maximum de 1% dans les différents types de carburants (CE, 1998). Le benzène ne peut en théorie pas dépasser la concentration de 0,1 % dans les produits d’entretien destinés à l’environnement intérieur. Enfin, pour être commercialisés, les produits de construction, de décoration et d’ameublement, doivent émettre moins de 1 µg/m3 de benzène (arrêté du 28 mai 2009).

    Valeur limite d’exposition en milieu professionnel

    Depuis 2001, la valeur limite d’exposition professionnelle (VLEP) autorisée en milieu professionnel est de 3,25 mg/m3 (équivalent à 1 ppm) pour une période de 8 heures de travail (Décret 2001-97, 2001).

    Valeurs guides pour les environnements intérieurs

    En 2008, l’Afsset (aujourd’hui Anses) préconisait des valeurs guides de qualité de l’air intérieur relatives au benzène pour ses effets hématologiques cancérogènes : 2 µg/m3 ou 0,2 µg/m3 selon l’excès de risque considéré, pour une durée d’exposition « vie entière » (AFSSET, 2008). A noter que l’OMS a publié en fin d’année 2010 des valeurs guides de qualité de l’air intérieur pour 9 substances dont le benzène. Les valeurs recommandées pour les effets cancérogènes étaient analogues à celles proposées par l’Afsset (WHO, 2010).

    En juin 2010, le HCSP a préconisé des valeurs repères d’aide à la gestion de santé publique (HCSP, 2010). Elles indiquent des seuils de concentration à partir desquels des actions de protection de la santé doivent être mises en place. Les actions envisagées viseraient à réduire les sources de combustion et de tabagisme dans l’habitat, à ventiler et, pour les émissions extérieures locales, à bien positionner le bâtiment et ses entrées d’air (constructions nouvelles et rénovées). Le HCSP fixe ainsi 3 valeurs pour les expositions chroniques à long terme :

    • la valeur cible de 2 µg/m3 représente l’objectif à atteindre en 5 ans dans tous les espaces clos habités ou accueillant du public ;
    • la valeur repère de 5 µg/m3 en-dessous de laquelle on ne préconise aujourd’hui aucune action corrective, et qui décroitra de 1 µg/m3 par an jusqu’à la valeur cible à atteindre en 2015 ;
    • la valeur d’action rapide de 10 µg/m3 au-delà de laquelle des mesures doivent ramener les teneurs en dessous de la valeur repère, dans un délai de quelques semaines.

    Valeurs réglementaires pour l’air ambiant

    La directive 2008/50/CE du 21 mai 2008 concernant la qualité de l’air et un air pur en Europe fixe une valeur limite en moyenne annuelle pour le benzène (protection de la santé humaine):

    • De 2001 à 2005 : 10 µg/m3
    • 2006 : 9 µg/m3 avec décroissance annuelle de 1 µg/m3 jusqu’en 2010
    • 2010 : 5 µg/m3

    La réglementation française fixe un objectif de qualité de 2 µg/m3 en moyenne annuelle.

  • Evolutions récentes et recommandations

    L’arrêté du 28 mai 2009 interdit les substances CMR1 et 2 dans les matériaux et produits de construction (et par la suite dans les produits de décoration) dans les espaces clos.

    Comme vu précédemment, s’agissant de l’air intérieur, l’Afsset (aujourd’hui Anses) (Afsset, 2009) puis le HCSP (HCSP, 2010) ont formulé des valeurs guides pour la qualité de l’air et la gestion des actions de protection de la santé vis-à-vis du benzène. Le décret du 2 décembre 2011 stipule que la valeur guide est fixée pour une exposition de longue durée à 5µg/m3 au 1er janvier 2013, et à 2 µg/m3 au 1er janvier 2016.

    La pollution par le benzène a fait l’objet ces dernières années de mesures dans le cadre d’études à l’échelle nationale, dans de multiples milieux intérieurs : campagne nationale de l’OQAI dans les logements (2003-2005), les écoles et les bureaux (2011-2014), et plus ponctuellement dans les gymnases, halls de gares et d’aéroports, parcs de stationnement, transports collectifs et individuels (Afsset, 2008). On relève ainsi des niveaux moyens de benzène compris entre 8 et 21 µg/m3 dans l’habitacle des véhicules des particuliers (Airparif, 2007).

    En 2010, l’Anses a émis des préconisations relatives à la pollution de l’air pour les travailleurs des parcs de stationnement couverts : réduction ou interdiction des activités, selon leur niveau de nécessité (Anses, 2010). Les bâtiments neufs livrés à partir de 2012 et ceux faisant l’objet de rénovations de grande ampleur devront présenter des teneurs en benzène inférieures à 2 µg/m3. Si des études de toxicologie chez l’enfant montraient des résultats spécifiques à cette population, le HCSP reconsidèrerait ces valeurs repères de qualité de l’air intérieur pour les espaces accueillant des enfants (crèches, écoles) (HCSP, 2010).

    En 2009, l’Afsset suggérait en tant qu’axe de recherche d’étudier davantage les effets conjugués de l’alcool et du benzène. De plus, l’amélioration de la qualité de l’’air intérieur par réduction des émissions d’agents cancérogènes probables ou possibles (le benzène étant l’un des agents cités) constituait l’une des mesures de prévention et de précaution prioritaires pour l’environnement général (Afsset, 2009).

Auteur : Département Prévention Cancer Environnement, Centre Léon Bérard

Sources rédactionnelles : CIRC, CITEPA, HCSP, Anses, Inserm

Relecture : Guillaume Boulanger (Anses), Séverine Kirchner et Corinne Mandin (Observatoire de la qualité de l'air intérieur, Centre Scientifique et Technique du Bâtiment)

Mise à jour le 16 août. 2022

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