Cancers professionnels
On considère que les AA représentent, avec les hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP), les deux ensembles de substances chimiques à l’origine de l’essentiel des cancers professionnels de la vessie. L’origine professionnelle de ces cancers reste insuffisamment recherchée, ce qui participe, avec les difficultés d’identification des expositions, à la sous déclaration de ces cancers (Imbernon, 2003).
L’exposition professionnelle aux AA serait responsable de 5,4% des cancers de la vessie (Imbernon, 2003). En 2003, l’enquête d’évaluation des expositions aux risques professionnels en France (SUMER) enregistrait 70 800 salariés exposés aux AA dont 15 600 l’étaient au-delà de 10 heures par semaine (DARES, 2006). Les principaux secteurs concernés par l’exposition aux AA sont les industries du caoutchouc, de cosmétiques, de pesticides (fabrication du chlordiméform), l’emploi des substances colorantes (secteurs du textile, du cuir et du papier), la plasturgie, et les laboratoires de recherche, qui représentent de multiples milieux professionnels où les risques sont plus ou moins élevés (INRS, 2007).
Dans l’industrie du caoutchouc, les tumeurs les plus représentées sont celles de la vessie, du fait de l’utilisation importante d’AA (InVS, 2006). Dans les laboratoires de recherche, l’utilisation des AA est éparse et en très faible quantité ; l’exposition y est donc maîtrisable. Les données sur l’emploi des AA peuvent être difficilement accessibles, notamment dans l’industrie des cosmétiques (INRS, 2007).
Les expositions professionnelles ont globalement baissé entre les années 1970 et 2000. On estime que les expositions aux trois AA cancérogènes de groupe 1 du CIRC (4-amino biphényle, benzidine, ß-naphtylamine) interdits en 1989 ont cessé depuis le milieu des années 80, par anticipation de l’interdiction par les industriels. Des travailleurs seraient cependant aujourd’hui exposés à la MOCA, substance elle aussi classée cancérogène certain, mais dont l’usage a seulement été restreint, la matière première étant toutefois entièrement importée d’Asie. Durcisseur des matières plastiques, la MOCA est essentiellement employée en plasturgie, où des réticences à la substitution ont été observées (Héry et al. 2006).
Réglementation
La production et l’utilisation de préparations contenant plus de 0,1% de 2-naphtylamine, 4-aminobiphényle, et de benzidine (3 AA classés 1 par le CIRC) sont interdites en France (décret du 28 août 1989), sauf à des fins de recherche, d’essai ou d’analyse scientifique. Dans ces situations, l’employeur doit s’assurer des moyens de prévention mis en œuvre (voir ci-dessous). Le « décret CMR » (décret n°2001-97 du 1er février 2001) demande la substitution des AA par des produits moins dangereux. Les salariés exposés à des AA cancérogènes peuvent bénéficier d’un suivi post-professionnel.
Prévention des risques professionnels
Selon l’enquête SUMER 2003, 19,1% des salariés exposés aux AA bénéficient d’une protection individuelle respiratoire, et 30% d’une protection oculaire. Dans 39,4% des cas, aucune protection collective (aspiration à la source, vase clos, ventilation générale) n’était mise en place (DARES, 2006).
D’après l’INRS, les principaux progrès réalisés ces trente dernières années sur la prévention des risques professionnels liés à l’exposition aux AA sont principalement dus aux interdictions et aux restrictions d’utilisation de certaines AA. Le dépistage précoce et la formation des salariés doivent encore s’améliorer, les équipements de protection individuelle étant encore souvent le seul moyen de prévention (INRS, 2007).
Maladies professionnelles liées aux AA
Les AA font l’objet de quatre tableaux de maladies professionnelles relevant du Régime général : les tableaux 15, 15 bis, 15 ter et 51.
Le tableau 15 ter concerne les lésions prolifératives de la vessie provoquées par certaines AA. Le délai de prise en charge est de 30 ans. Depuis août 2012, la durée d’exposition requise est de 5 ans, quels que soient les travaux et les types d’expositions considérés.
Les AA sont à l’origine d’autres pathologies professionnelles, répertoriées dans les autres tableaux, comme notamment des allergies, des affections dermatologiques, ou des troubles neurologiques.