Polychlorobiphényles en région Rhône-Alpes

Présentation

Cette fiche additionnelle sur la thématique des polychlorobiphényles (PCB) traite de l’exemple de la pollution par les PCB en Rhône-Alpes.

Les PCB ou polychlorobiphényles connus sous le nom de pyralènes sont des composés complexes utilisés par l’industrie à partir des années 30 pour leurs propriétés isolantes (transformateurs électriques) et leur stabilité chimique (encres, peintures). Leur production et leur utilisation ont progressivement été réduites au cours des années 70 puis interdites en 1987.

Peu biodégradables, ces molécules sont classées parmi les polluants organiques persistants (POP). Elles s’accumulent progressivement dans l’environnement en particulier dans certains réservoirs comme les sédiments marins ou de rivière.

Chez l’homme l’alimentation constitue la principale source d’exposition aux PCB (90%). Environ 50 % de l’exposition alimentaire est apportée par les produits de la pêche (poissons d’eau douce, d’eau de mer et fruits de mer), 20 % par les viandes, 20% par le lait et les produits laitiers. Les PCB s’accumulent dans l’organisme plus particulièrement au niveau du tissu adipeux et peuvent être retrouvés dans le lait maternel et les lipides sanguins (Brucker-Davis, 2008).

  • Une pollution historique du Rhône par les PCB

    En France, le Rhône est le révélateur de la pollution aux PCB. En mars 2005 grâce au plan de surveillance de la qualité des aliments, des teneurs élevées en PCB dans la chair de poissons (brèmes) prélevées dans le canal de Jonage (limite Ain/Rhône) sont décelées. En réponse à cette alerte sanitaire, le 14 septembre 2005, le préfet du Rhône interdit la consommation des poissons pêchés dans les deux zones contaminées : le Canal de Jonage et le plan d’eau du Grand Large. Cette décision administrative est prise conformément à une recommandation de l’AFSSA* et en application du principe de précaution.

    Au cours de l’année 2006 la zone contaminée s’étend jusqu’à la limite aval de la zone étudiée (barrage de Vaugris au sud de Lyon).

    En février 2006, la valeur limite de contamination par les polychlorobiphényles de 8 picogrammes par gramme de poisson frais entre en vigueur.

    En 2007 de nouvelles analyses effectuées sur la faune piscicole révèlent une contamination par les PCB dépassant la valeur limite. Ces résultats entraînent l’extension de la zone d’interdiction de la consommation dans neuf départements (Ain, Ardèche, Bouches-du-Rhône, Drôme, Gard, Isère, Loire, Rhône, Vaucluse) couvrant l’ensemble du linéaire du Rhône depuis le barrage de Sault-Brénaz, dans l’Ain, jusqu’à l’embouchure du fleuve. En 2007 une série d’arrêtés sont pris par les préfets des départements riverains du Rhône.

    Un certain nombre de sites industriels connus du fait d’une pollution de leurs sols ou rejets dans l’eau sont suspectés au titre de leurs activités antérieures comme sources de rejets de PCB : environ 115 pour l’ensemble du bassin Méditerranéen et une 60aine pour la région Rhône-Alpes.

    La base de données BASOL accessible sur le site internet du Ministère de l’Ecologie répertorie les sites pollués, et recense environ 60 sites pour la seule région Rhône-Alpes.

  • PCB : quels sont les poissons les plus à risque ?

    En 2008, une étude de la CIPEL (Commission Internationale pour la Protection des Eaux du Léman) et du SILA (Syndicat Mixte du Lac d’Annecy) a révélé une forte pollution aux PCB dans les lacs alpins du Léman et d’Annecy. Les analyses ont montré que les populations d’omble chevalier, poisson sauvage d’eau douce, présentent une concentration en PCB 4 fois supérieure à la norme européenne.

    – les espèces de fond tels que : brème, carpe, barbeau, qui se nourrissent principalement de végétaux, de matières en suspension, de petits crustacés et de larves d’insectes.
    – les poissons qui présentent une forte teneur en matière grasse. C’est le cas en particulier de l’anguille, poisson gras se nourrissant volontiers dans les sédiments et accumulant des graisses lors de sa vie dans les fleuves et les estuaires, en vue d’une future migration.

  • Règlementations

    Le règlement (CE) n°1881/2006 de la commission du 19 décembre 2006 fixe des teneurs maximales pour certains contaminants dans les denrées alimentaires, dont les dioxines, furanes et PCB de type dioxine. La teneur maximale en dioxines, furanes et PCB-DL est de 8 pg TEQ*/g de poids frais pour la chair musculaire de poisson et les crustacés et de 12 pg TEQ*/g de poids frais pour l’anguille.

    C’est en décembre 2011 que le règlement 1259/2011, applicable depuis le 1er janvier 2012, a révisé le règlement précédent en abaissant les teneurs maximales en dioxines et PCB de type dioxines dans les aliments et en introduisant également des teneurs maximales pour les PCB-NDL (PCB non-dioxine-like) dans les poissons sauvages d’eau douce, les foies de poissons et les denrées destinées aux nourrissons et aux enfants en bas âge.

    La réglementation européenne fixe des teneurs maximales pour les dioxines, furanes, les PCB de type dioxine (PCB-DL) et les PCB de type non dioxine (PCB-NDL) dans les produits de la pêche (Source Comité de suivi PCB- 19 janvier).

     Teneurs maximales réglementaires en dioxines et PCB des produits de la pêche mis sur le marché au 1er janvier 2012 Source Comité de suivi PCB- 19 janvier

    Somme des dioxines et PCB de type dioxine (OMS-PCDD/FPCB-TEQ) Somme des 6 PCB de types non dioxines (PCB-NDL)
    Chair musculaire de poisson, produits de la pêche et produits dérivés, à l’exclusion:

    • de l’anguille sauvage capturée,
    • du poisson d’eau douce sauvage capturé, à l’exception des espèces de poissons diadromes capturées en eau douce,
    •  du foie de poisson et des produits dérivés de sa transformation,
    • des huiles marines.

    La teneur maximale pour les crustacés s’applique à la chair des appendices et de l’abdomen. Dans le cas des crabes et crustacés de type crabe (Brachyura et Anomura), et à la chair musculaire des appendices.

    6,5 pg /g de poids à l’état frais 75 ng/g de poids à l’état frais
    Chair de poisson d’eau douce sauvage capturé, à l’exception des espèces de poissons diadromes capturées en eau douce, et produits dérivés. 6,5 pg/g de poids à l’état frais 125 ng/g de poids à l’état frais
    Chair d’anguille (Anguilla anguilla) et produits dérivés 10 pg /g de poids à l’état frais 300 ng/g de poids à l’état frais

    Les interdictions de consommation et de commercialisation des poissons concernent aujourd’hui 45 cours d’eau et 5 plans d’eau du bassin Rhône-Méditerranée. Les arrêtés d’interdiction sont consultables sur le site www.rhone-mediterranee.eaufrance.fr  ; on y trouve également l’ensemble des informations et des données sur la contamination par les PCB dans le bassin.

  • PCB et risques pour la santé

    Les effets sanitaires les plus souvent rapportés chez l’homme exposé aux PCB sont :

    • des effets neurocomportementaux, des ictères* et des dérèglements hépatiques ;
    • une perturbation des paramètres immunitaires de l’enfant exposé in utero ou au cours de la période périnatale par l’allaitement et jusqu’ à trois ans ;
    • des effets sur le système endocrinien (en particulier sur la thyroïde) pour le reste population.

    Les PCB sont classés cancérogènes probables (Groupe 2A du CIRC) pour les cancers hépatobiliaires (foie, voies biliaires, pancréas…). Le PCB 126 est classé cancérogène certain (groupe1).

    En  2008 dans le cadre de l’axe 4 du plan interministériel d’actions sur les PCB publié en 2008, l’Anses, en collaboration avec l’Institut de veille sanitaire (InVS), ont étudié l’imprégnation aux PCB des consommateurs de poissons d’eau douce. Quatre ans d’études ont permis de sonder 21.180 foyers de pêcheurs amateurs issus de la Seine, la Somme, le Rhône, le Rhin, la Loire. 606 personnes et 16 pêcheurs professionnels consommateurs ou non de poissons d’eau douce ont accepté un prélèvement sanguin pour déterminer le niveau d’imprégnation aux PCB : au total, 2 % dépassent le seuil critique.

    Cette étude, publiée le 19 janvier 2012 par l’Anses met en avant :

    • une relation entre la consommation de poissons fortement bio-accumulateurs et les niveaux d’imprégnation des consommateurs.
    • la consommation des poissons d’eau douce par les foyers de pêcheurs est faible (13%) les niveaux d’imprégnation observés dans l’échantillon de pêcheurs amateurs sont similaires à ceux observés dans la population générale.

    Un programme pluriannuel de biosurveillance humaine est en cours ; le pilotage technique a été confié à Santé publique France. La biosurveillance humaine est une méthode de surveillance de l’exposition des populations à divers facteurs environnementaux dont des polluants chimiques. Elle se caractérise par la mesure de biomarqueurs dans les liquides et les tissus biologiques (sang, urine, cheveux) témoins d’une imprégnation par des substances toxiques pour la santé humaine.

    Le programme d’action du bassin Rhône-Méditerranée est piloté par la DREAL Rhône-Alpes.

    Un plan de cessation d’activité de la pêche (PCA) a été mis en place concernant l’activité des pêcheurs professionnels qui a été fortement impactée sur les zones contaminées depuis 2005.

    Des résultats ont été obtenus en termes de qualité physico-chimique, une amélioration nette est observée et cette tendance devrait se poursuivre au vu des programmes engagés (station d’épuration de Pierre Bénite, politique de lutte contre les toxiques de l’agglomération lyonnaise).

  • Evolutions récentes

    En lien avec les conclusions de leur étude, l’Anses a formulé les recommandations suivantes :

    • limiter la consommation de ces poissons à une fois tous les deux mois pour les femmes en âge de procréer, enceintes ou allaitantes ainsi que les enfants de moins de 3 ans, les fillettes et les adolescentes, et à deux fois par mois pour le reste de la population.
    • être vigilant et faire un suivi des zones les plus fortement contaminées (Seine et Somme ; Rhône, Rhin et Moselle dans une moindre mesure) et identifier d’autres zones fortement contaminées, le cas échéant de façon accidentelle.

    Dans le cadre du PNSE2, une enquête en population générale sera réalisée par l’InVS sur un échantillon de 5 000 personnes résidant en France, âgées entre 6 et 75 ans : l’enquête ESTEBAN (Environnement, SanTé, Biosurveillance, Activité physique, Nutrition). Cette enquête permettra la description puis le suivi au niveau national des niveaux d’imprégnation de la population sur une centaine de substances retenues au regard de leurs impacts présumés et/ou observés sur la santé grâce au suivi de bioindicateurs. L’enquête démarrera en 2013 et les premiers résultats pourront être disponibles à partir de 2015.

Auteur : Département Prévention Cancer Environnement, Centre Léon Bérard

Relecture : Lucie Anzivino-Viricel, ORS Auvergne Rhône-Alpes ; Pr. Gérard Keck, Ecole vétérinaire de Lyon

Mise à jour le 25 août. 2022

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