Cancer de la cavité buccale (orale)

Le saviez-vous ?

Les cancers de la cavité buccale font partie des cancers des voies aérodigestives supérieures (VADS). Ils sont les plus fréquents (25 à 40%) des cancers des VADS.

En France métropolitaine en 2018, 4 677 nouveaux cas de cancer de la cavité́ buccale ont été estimés, dont 66 % chez l’homme ; le nombre de cas chez les femmes tend à augmenter.

Les deux facteurs de risque principaux sont le tabac, en particulier quand la consommation dépasse 20 paquets-années (Unité de mesure de la consommation de tabac calculée en multipliant le nombre de paquets de cigarettes fumées par jour par le nombre d’années pendant lesquelles la personne a fumé) et l'alcool.

Les femmes sont également exposées à ces facteurs de risque de manière croissante car leur consommation de tabac et d’alcool est en augmentation sur les 20 dernières années.

Chez un individu qui boit et qui fume le risque de cancer des VADS est 15 fois plus élevé

La sensibilisation aux facteurs de risque, la prévention primaire par l'élimination de la consommation de tabac et la modération de la consommation d'alcool sont essentielles pour réduire l’incidence des cancers de la cavité buccale.

Présentation

Les cancers de la cavité buccale sont des cancers qui se développent au niveau du plancher de la bouche, des 2/3 antérieurs de la langue, du palais, des joues, des gencives et des lèvres. Aujourd’hui, 70 % des cancers de la cavité buccale sont diagnostiqués trop tardivement, ce qui réduit les chances de guérison.

Les VADS sont drainées par plusieurs chaînes ganglionnaires qui sont situées au niveau du cou. Les ganglions lymphatiques qui les composent peuvent être envahis par des cellules cancéreuses. On parle alors d’envahissement ganglionnaire.

  • Epidémiologie

    En France métropolitaine en 2018, le nombre annuel de nouveaux cas de cancer de la cavité buccale est passé de 4 168 en 1990 à 3 106 en 2018 (‐25 %) chez l’homme. Chez la femme, le nombre annuel de nouveaux cas de cancer de la cavité buccale a plus que doublé (+122 %) entre 1990 et 2018, passant de 708 à 1 571. Cette hausse est attribuable pour plus de la moitié (+67 %) à une augmentation du risque, associée à un accroissement et un vieillissement de la population (INCa, 2019).

    Les taux d’incidence standardisés Monde (TSM) sont de 5,7 cas pour 100 000 personnes‐années chez l’homme et 2,3 cas pour 100 000 personnes‐années chez la femme (rapport hommes/ femmes = 2,5). La grande majorité (2/3) des patients atteints d’un cancer des voies aérodigestives supérieures sont des hommes. Depuis plusieurs années, le nombre de cas chez les femmes tend à augmenter.

    L’âge médian au diagnostic en 2018 est de 62 ans chez l’homme et de 66 ans chez la femme. La courbe des taux d’incidence selon l’âge montre une progression marquée des taux à partir de l’âge de 40 ans, plus importante chez les hommes pour atteindre une valeur maximale de 28,2 pour 100 000 chez les hommes entre 60 et 64 ans, puis une décroissance progressive jusqu’à 79 ans et une ré-augmentation ensuite; chez les femmes, l’augmentation des taux est marquée par un palier entre 55 et 75 ans puis atteint un maximum de 18,0 chez les femmes entre 90 et 94 ans (Santé publique France, 2019).

    Au niveau mondial, le nombre de cas de cancers de la cavité buccale (orale) est de 377 713, avec un nombre de décès équivalent à 177 757 tous âges et tous sexes confondus. Le taux d’incidence des cancers de la cavité buccale varie selon les pays. Une prévalence est observée dans les pays d’Asie du Sud Est et d’Inde avec une consommation élevée de Bétel (noix d’Arec). Cette incidence élevée est également corrélée avec les consommations associées d’alcool et de tabac (Globocan, 2020).

  • Facteurs de risques avérés

    Le tabac et l’alcool sont les 2 facteurs de risque majeurs de développer un cancer des VADS, notamment celui de la cavité buccale. Lorsqu’ils sont consommés ensemble, les effets du tabac et de l’alcool ne s’additionnent pas mais se multiplient. C’est ce qu’on appelle un effet synergique sur le risque de cancer des VADS (Mello, 2019).

    Facteurs de risques individuels et facteurs génétiques

    Tabac

    90% des patients atteints d’un cancer de la cavité orale sont fumeurs. Les risques augmentent avec la quantité de tabac fumé et sa durée. Les cancers de la bouche sont six fois plus fréquents parmi les fumeurs ou ex-fumeurs que parmi les non-fumeurs. Ces changements peuvent être réversibles si l’on arrête la consommation de tabac.

    Alcool

    75% des individus atteints de cancers de la cavité orale sont des consommateurs d’alcool. Comme pour le tabac, le risque de développer ce cancer est 6 fois plus élevé chez les buveurs. L’alcool est un facteur de risque pour le carcinome épidermoïde oral. Il augmente la perméabilité de l’épithélium oral, agit comme solvant pour les cancérigènes du tabac, induit la prolifération des cellules basales et génère des radicaux libres et de l’acétaldéhyde, qui ont la capacité de causer des dommages à l’ADN. L’acétaldéhyde est un des premiers métabolites de l’éthanol, c’est l’agent critique par lequel une consommation prolongée et excessive de boissons alcoolisées augmente le risque de carcinome épidermoïde oral. L’alcool agit également en synergie avec les produits de la combustion du tabac dans la pathogenèse du carcinome épidermoïde oral (Feller, 2013).

    Chez un individu qui boit et qui fume, le risque de cancer des VADS est 15 fois plus important. La revue de Mello réalisée en 2019 à partir de 3260 articles décrit une probabilité élevée de survenue de carcinome de la cavité orale avec la consommation synergique d’alcool et de tabac fumé (RC = 4,74 ; 95 % IC = 3,51-6,40), d’alcool et de tabac sans fumée (RC = 7,78 ; 95 % IC = 2,86-21,14), et d’alcool, de tabac fumé et de tabac sans fumée (RC = 16,17 ; 95 % IC = 7,97-32,79) (Mello, 2019). Les connaissances issues de cette recherche peuvent être utiles pour une meilleure compréhension des différences dans l’effet de la consommation synergique d’alcool et de tabac sur le développement de cancer de la cavité orale. Ces données pourraient aider les autorités sanitaires à élaborer des mesures de lutte contre le tabac et l’alcool en tenant compte des besoins de leur population (Melo, 2019).

    Les consommations d’alcool, de tabac et produits dérivés du tabac entraînent des altérations génétiques de certains gènes suppresseurs de tumeurs (APC, p53), des modifications de l’expression de proto-oncogènes (Myc), d’oncogène (Ras) et de gènes contrôlant les processus cellulaires normaux (EIF3E, GSTM1) (Johar, 2017).

    Age et genre

    La plupart des patients qui développent un cancer de la cavité buccale ont entre 50 et 60 ans. Les hommes sont plus à risque de développer ce cancer que les femmes.

    Maladies de la cavité orale 

    Certaines maladies de la cavité buccale prédisposent au risque de cancer. Parmi celles-ci, on connait le lichen plan buccal. Les lésions de leucoplasie et d’erythroplasie sont également à risque de transformation en cancer.

    Leucoplasie : Les signes de leucoplasie sont la formation d’une zone anormale blanche ou grise sur la langue, l’intérieur de la joue, les gencives ou le plancher de la bouche. Les leucoplasies d’aspect hétérogène sont plus à risque de développer un cancer que celles d’aspect homogène. Certaines leucoplasies sont associées à des anomalies cellulaires appelées alors dysplasie.

    Érythroplasie : Les signes et symptômes de l’érythroplasie sont l’apparition d’une zone rouge anormale ou d’un groupe de taches rouges anormales sur la muqueuse tapissant la bouche. L’érythroplasie n’est pas synonyme de cancer, mais cet état précancéreux risque de se transformer en cancer. Environ 50 % de ces lésions évoluent en carcinome épidermoïde.

    Papillomavirus humain (HPV)

    L’infection par le papillomavirus humain est impliquée dans l’apparition des cancers de l’oropharynx (arrière de la gorge, y compris les amygdales et la base de la langue) (Stolen, 2013) mais à ce jour pas dans celui de la cavité buccale (lèvres, la partie de la langue qui est visible (langue mobile), plancher buccal, gencives, palais et face interne des joues).

    Autres facteurs de risques comportementaux débattus

    Pour ces substances les études sont insuffisantes et contradictoires.

    Consommation de cannabis, chique de Bétel, Cannabis, Marijuana

    Ces substances sont commercialisées pour une utilisation par voie orale ou nasale. Tous contiennent de la nicotine et les nitrosamines spécifiques au tabac, y compris la NNN (N’-nitrosonornicotine) et le NNK (Nitrosométhylamino-4 (pyridyl-3)-1 butanone-1).

    La consommation de la chique de Bétel, avec ou sans tabac, fortement consommée dans les pays d’Asie de l’Est est classée cancérogène certain pour l’homme (Groupe 1). L’utilisation du tabac non fumé provoque le cancer de la cavité buccale (CIRC, 2009).

    Fumé sous la forme de joint ou inhalé pur ou mélangé à du tabac, le cannabis libère des substances nocives dont certaines sont cancérogènes (benzopyrène, cadmium, dioxines et nitrosamines) (OFDT, 2006). Mais à ce jour, aucune donnée scientifique ne permet de valider un lien entre consommation de cannabis et cancer de la cavité buccale, des études complémentaires sont nécessaires (Hashibe, 2005). Les études sont insuffisantes et contradictoires. L’étude d’une potentielle association entre la consommation de marijuana chez les personnes nées après 1950 et le risque de cancer de l’oropharynx et de la langue sont compatibles avec les effets cancérogènes des cannabinoïdes.

    Des connaissances supplémentaires sont nécessaires pour identifier le mécanisme d’action de la consommation de marijuana seule afin d’éliminer les facteurs confondants tels que les consommations de tabac et/ou d’alcool (Marks, 2013).

  • Evolutions récentes

    Recommandations

    Il est important de faire surveiller régulièrement sa bouche, car les lésions causées par un cancer buccale ne sont pas faciles à repérer par soi-même et ne sont pas forcément douloureuses. Les chirurgiens-dentistes et les médecins traitants peuvent jouer un rôle déterminant dans cette détection et orienter vers un spécialiste, si besoin.

    Une vigilance accrue est conseillée pour les fumeurs et les consommateurs réguliers d’alcool (Mâkinen, 2016).

    Pour bénéficier d’une aide pour l’arrêt d’une addiction 

    L’arrêt de la consommation d’alcool et/ou de tabac est recommandé pour toute personne et en cas de cancer des VADS afin de réduire le risque de complications pendant et après les traitements. Si vous souffrez d’une dépendance à l’alcool et/ou au tabac, il est possible de vous faire aider.

    Arrêter la consommation d’alcool et de tabac fait partie du traitement de votre cancer. Cela permet de réduire les risques de complications pendant et après les traitements. Cela diminue également le risque de développer un second cancer et augmente les chances de survie. (www.tabac-info-service.fr ; www.alcool-info-service.fr )

Auteur : Département Prévention Cancer Environnement, Centre Léon Bérard

Relecture : Dr Ingrid Breuskin, Chirurgien en otorhinolaryngologie et chirurgie cervico-faciale, Département de Cancérologie cervico-faciale, Gustave Roussy.

Mise à jour le 09 avri. 2024

Une question, un avis ?

Ce formulaire vous permet de contacter le Département Prévention Cancer Environnement. Nous veillerons à vous répondre dans les meilleurs délais.

Contactez-nous !

Ce contenu vous a été utile ?