Hémopathies malignes de l'enfant

Le saviez-vous ?

Les leucémies représentent le premier cancer de l'enfant, avec 450 à 500 nouveaux cas par an en France.

Seules expositions aux radiations ionisantes sont reconnues comme facteur de risque des hémopathies malignes de l’enfant.

D’autres facteurs de risque environnementaux sont suspectés : l’exposition aux champs électromagnétiques à extrêmement basse fréquence, au radon, aux pesticides.

D’importantes études épidémiologiques sont actuellement en cours. Elles apporteront de nouvelles informations sur les expositions susceptibles de favoriser l’apparition de leucémies chez l’enfant.

Présentation

Les hémopathies malignes représentent environ 40% de la totalité des cancers avant l’âge de 15 ans. La classification internationale des cancers de l’enfant (ICCC : international Classification of Childhood Cancer) distingue deux groupes :

  • les leucémies syndromes myéloprolifératifs et myélodysplasiques
  • les lymphomes et néoplasmes réticulo endothéliaux.

Les craintes d’expositions prolongées ou ponctuelles à des agents de l’environnement potentiellement cancérogènes font naître des inquiétudes dans la population générale.

  • Epidémiologie

    Les leucémies et syndromes myéloprolifératifs et myélodysplasiques

    Les leucémies représentent le 1er cancer pédiatrique, avec 450 à 500 nouveaux cas par an en France. Les progrès de la recherche permettent aujourd’hui d’atteindre un taux de guérison supérieur à 80%, contre 30 % il y a 30 ans.

    Cette maladie affecte le système sanguin et se traduit par l’infiltration de cellules tumorales dans la moelle osseuse ainsi que dans le sang. Selon le type de cellules sanguines touchées, mais aussi selon le stade de l’hématopoïèse affecté par la maladie, les leucémies prennent des formes variées et par conséquent leurs symptômes, leur évolution et leurs traitements seront différents.

    Chez l’enfant, on rencontre principalement des leucémies aiguës (LA). Les leucémies aiguës lymphoblastiques (LAL) représentent environ 80% des cas de LA et plus de 80% sont des LAL de la lignée B. On note une prédominance masculine, elles touchent très rarement les enfants de moins d’un an (moins de 2% des cas), et ont un pic d’incidence entre 2 et 5 ans dans tous les pays industrialisés. L’incidence des leucémies aigües myéloïdes (LAM) est plus élevée chez les enfants de moins d’un an, puis elle diminue nettement pour se stabiliser à partir de 5 ans.

    Les lymphomes et néoplasmes réticulo-endothéliaux

    L’incidence annuelle des lymphomes de Hodgkin (LH), en France est d’environ 7 cas par millions d’enfants d’après le registre national des hémopathies malignes de l’enfant. Moins de 3% des cas surviennent avant l’âge de 5 ans et l’incidence augmente fortement avec l’âge. Le sex ratio, très élevé avant 10 ans (4 garçons pour 1 fille), devient proche de 1 à 15 ans.

    L’incidence des lymphomes non Hodgkiniens (LNH) est de 9 cas par million avec de très rares cas avant l’âge de 1 an. Les lymphomes de Burkitt impliquant les cellules B matures représentent la moitié des LNH ; ils représentent le type histologique le plus fréquent chez les enfants de 3 à 8 ans mais leur incidence diminue chez les enfants plus âgés. Les lymphomes lymphoblastiques T et B représentent respectivement 17% et 5 % des cas.

    Les leucémies chroniques (LC) sont rares chez l’enfant. Les leucémies lymphoïdes chroniques (LLC) ne se voient pas chez l’enfant, les leucémies myéloïdes chroniques (LMC) et les leucémies myélomonocytaires chroniques (LMMC) sont aussi extrêmement rares (0,6 et 0,7 cas par million par an).

    Les syndromes myélodysplasiques (SMD) sont aussi très rares chez l’enfant avec une incidence de 0,5 cas par million par an et leur sex ratio est de 1,4 garçon pour 1 fille.

  • Facteurs de risques environnementaux

    De nombreuses équipes de recherche étudient les liens possibles entre expositions environnementales et certains types de cancers de l’enfant.

    Seules les expositions aux rayonnements ionisants sont reconnues comme facteur de risque des hémopathies malignes de l’enfant.

    D’autres facteurs de risque sont établis, tels que les radiations non ionisantes ou champs électromagnétiques d’extrêmement basse fréquence, l’exposition au radon et aux pesticides.

    Enfin les expositions professionnelles parentales au benzène, aux hydrocarbures polycycliques (HAP), la pollution atmosphérique générée par le trafic automobile sont suspectées.

  • Radiations ionisantes

    Les expositions environnementales aux radiations ionisantes représentent un facteur de risque reconnu de leucémies de l’enfant. L’exposition externe aux rayonnements ionisants est établie et le risque reste plus important pour les expositions reçues pendant l’enfance (UNSCEAR, 2000).

    L’étude des survivants des bombardements de Hiroshima Nagasaki vient renforcer cette hypothèse puisqu’elle a montré que le risque de leucémies par unité de dose était 5 à 10 fois plus élevé pour les radiations subies avant l’âge de 5 ans et que le délai d’apparition du cancer était plus court (Preston, 2004). Néanmoins, des interrogations persistent, notamment sur les effets des expositions internes et les risque associés aux très faibles expositions.

    Depuis 1984, de nombreuses études épidémiologiques ont analysé le risque de leucémies chez les enfants à proximité des sites nucléaires. A la différence d’études ponctuelles, les études réalisées sur de nombreux sites n’ont pas permis de montrer une augmentation du risque (Laurier, 1999).

    Une étude récente réalisée par le comité consultatif du gouvernement britannique sur l’aspect médical des radiations dans l’environnement montre que le fait de vivre à proximité d’une centrale n’augmente pas les risques de développer une leucémie chez l’enfant.

    L’étude française Geocap étudie (entre autres) chez l’enfant l’association entre le fait de vivre à proximité d’une centrale nucléaire et le risque de développer une leucémie. Les derniers résultats (Sermage-Faure, 2012) montrent une augmentation du risque de leucémie chez les enfants vivant dans un rayon de 5 km autour des centrales nucléaires françaises sur la période 2002-2007.

    Ce résultat repose sur des effectifs très faibles, et n’est pas confirmé sur une période plus longue ou lorsque l’on utilise un zonage fondé sur la modélisation des rejets gazeux des centrales, comme le précise l’IRSN dans sa note d’analyse (note d’analyse de l’IRSN du 12 janvier 2012). Les auteurs précisent donc que les résultats sont à interpréter avec prudence, notamment du fait des faibles effectifs permettant d’arriver à ce résultat et de la confrontation à d’autres données.

  • Radiations non ionisantes

    Les champs électromagnétiques à extrêmement basse fréquence (CEMEBF), produits par des lignes à haute tension, ou par le câblage des installations et appareils domestiques font également partie des facteurs soupçonnés d’augmenter le risque de leucémie de l’enfant.

    En 2000, deux méta-analyses regroupant les données de plusieurs enquêtes ont été publiées. La première (Ahlbom, 2000) a conclu à un risque doublé de leucémies de l’enfant pour des expositions estimées à 0,4 µTesla ou plus, aucune relation dose-risque n’est mise en évidence. La seconde étude (Greenland, 2000), moins sélective, n’a pas pu aboutir à une relation dose-risque.

    Les résultats convergents de ces deux études ont conduit le Centre International de Recherche sur le Cancer (CIRC) à les classer dans le groupe 2B des cancérogènes possibles (CIRC, 2002). En 2005 l’équipe de Draper (Grande Bretagne) rapporte un risque de 1,7 chez les enfants résidant à moins de 200 mètres d’une ligne à haute tension et concluent qu’environ 1 % des cas de leucémies britanniques pourraient être imputables à ces expositions (Draper, 2005).

    Exposition au radon

    Le radon est un gaz radioactif naturel principalement retrouvé dans des sous sols granitiques, et est à l’origine de l’exposition moyenne d’un tiers de la population française. Plusieurs études ont montré une association entre la concentration de radon domestique estimée et le risque de leucémie aiguë lymphoblastique (Evrard, 2006).

    Toutefois, des études épidémiologiques complémentaires sont nécessaires pour identifier une augmentation du risque de leucémies chez l’enfant dû aux expositions.

    De même une étude récente sur les populations du Danemark indique un risque possible de leucémie chez l’enfant en rapport avec le radon dans l’habitat. Mais ces études demandent à être confirmées avant de pouvoir tirer des conclusions définitives.

    Il est à noter qu’en France, des études sur les leucémies en rapport avec la radioactivité naturelle sont actuellement en cours dans le cadre d’une collaboration entre l’Inserm et l’IRSN.

    Une étude de la Société danoise du cancer récemment publiée dans la revue Epidemiology indique que le risque de leucémies aiguës lymphoblastiques chez les enfants augmente avec leur exposition au radon.
    Il augmente de 63% entre une exposition supérieure à 890 becquerels par mètre cube (Bq/m3) et une exposition inférieure à 260 Bq/m3. La hausse du risque n’a été associée avec aucun autre type de cancer.

  • Exposition aux pesticides

    En 2009, une étude canadienne a analysé les données de 31 études épidémiologiques publiées entre 1950 et 2009 ayant évalué le lien entre les leucémies chez l’enfant et l’exposition antérieure des parents. Dans cette étude, l’exposition pré-natale de la mère aux pesticides est associée au risque de leucémie chez l’enfant (Wigle, 2009).

    Si la leucémie chez l’enfant n’est pas associée à l’exposition paternelle aux pesticides, l’exposition de la mère présente une influence importante ; cette association est par ailleurs plus forte parmi certains sous-groupes, notamment celui des agricultrices.

    Bien que les preuves d’associations entre l’exposition parentale professionnelle aux pesticides et les leucémies de l’enfant restent aujourd’hui encore trop limitées, sur base du principe de précaution les politiques de santé publique visant à réduire au minimum de telles expositions se justifient pleinement, tout spécialement les actions ayant pour but d’éviter l’exposition des mères durant leurs grossesses.

  • Autres expositions

    Les expositions à l’essence, aux gaz d’échappement, aux fumées de tabac constituent autant de sources potentiellement impliquées dans le risque de leucémies chez l’enfant. Néanmoins à ce jour, aucune étude ne permet de confirmer ces données.

  • Evolutions récentes

    Il existe deux registres pédiatriques nationaux:

    • Registre National des Hémopathies malignes de l’enfant (RNHE) en 1995 à l’unité 754 de l’INSERM.
    • Registre National des tumeurs solides de l’enfant (RNTSE) en 2000 au CHU de Nancy

    Le RNHE et le RNTSE incluent tous les enfants atteints d’un cancer, âgés de moins de 15 ans et résidant en France métropolitaine à la date de diagnostic. Le RNHE enregistre spécifiquement les cas d’hémopathies malignes et le RNTSE les cas de tumeurs solides.

    Différentes études épidémiologiques sont en cours pour préciser le rôle de l’environnement dans le risque de leucémies chez l’enfant : ESTELLE, GEOCAP, MOBI-KIDS, ces projets (Inserm, U754) précisent par des études épidémiologiques le rôle de l’environnement.

    Le projet ESTELLE est le prolongement du projet ESCALE (Étude épidémiologique Sur les Cancers et les Leucémies de l’Enfant) (Amigou, 2011 ; Brosselin, 2009 ; Rudant, 2007 ; Rudant, 2008). Son objectif est d’étudier les facteurs de risque périnataux, infectieux, environnementaux et génétiques des cancers de l’enfant. Il s’agit d’une enquête nationale, cas-témoins et familiale qui inclut les enfants de moins de 15 ans atteints en 2010-2011 de leucémie, lymphome, tumeur cérébrale, neuroblastome, néphroblastome ou hépatoblastome.

    Le projet GEOCAP a pour objectif d’étudier de façon systématique le rôle dans les cancers de l’enfant, de plusieurs expositions environnementales estimées à l’adresse géocodée du domicile de l’enfant au moment du diagnostic.

    Le projet porte notamment sur le trafic routier et l’exposition au benzène, les lignes à haute tension et l’exposition aux champs électriques et magnétiques, les stations-service et l’exposition au benzène, les sites industriels classés Seveso et les expositions aux PCBs et aux dioxines, les expositions domestiques au radon d’origine volcanique.

    Dans le cadre de ce projet une nouvelle étude menée sur 2779 patients pédiatriques atteints d’une leucémie aiguë diagnostiquée entre 2002 et 2007 et 30000 témoins a évalué l’association entre une exposition à des champs magnétiques de faible fréquence induits par des lignes à haute tension et le risque de développer la maladie (Sermage-Faure, 2013).

    L’étude montre une incidence accrue de leucémies aigues chez les enfants vivant à moins de 50 m des lignes à très haute tension de 400KV (OR=1.7 (0.9–3.6)). En revanche aucune augmentation de risque de leucémies chez les enfants n’a été observée au-delà de cette distance pour les lignes à très hautes tensions ou chez l’enfant vivant à moins de 50m de lignes de hautes tensions de 63-150KV.

    Une enquête internationale, MOBI-KIDS sur le rôle des téléphones portables est en cours d’exploration. Pour l’instant il n’y a aucune donnée établie.

Auteur : Département Prévention Cancer Environnement, Centre Léon Bérard

Sources rédactionnelles : Anses ; CIRC ; Santé Publique France ; Ligue Contre le cancer

Relecture : Pr Yves Bertrand, CHU-Lyon, Lyon.

Mise à jour le 15 sept. 2022

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