Fer et ses composés

expositions professionnelles

Le saviez-vous ?

Le CIRC a évalué les fumées de soudage contenant des oxydes de fer cancérogènes pour l’homme (Groupe 1).

Le fer est un minéral essentiel à notre organisme, impliqué dans de nombreux processus physiologiques tels que la synthèse de l’hémoglobine.

Le fer et ses composés sont rejetés dans la nature lors des processus naturels (corrosion et lessivage des roches et des minerais) mais aussi par de multiples activités industrielles.

La principale voie d’exposition pour la population générale est la voie orale par l’ingestion d’aliments contenant du fer.

La voie d’exposition la plus fréquente des travailleurs est l’inhalation de fumées contenant du fer et des oxydes de fer.

Le CIRC a classé deux activités professionnelles comme cancérogènes pour l’homme : l’extraction souterraine d’hématite comportant une exposition au radon et la production de fonte et d’acier.

La sidérose, le cancer broncho-pulmonaire primitif et la broncho-pneumopathie chronique obstructive entrainant un déficit respiratoire chronique peuvent être considérées comme des maladies professionnelles suite à une exposition prolongée au fer et à ses composés (tableaux 44 et 44 bis du régime général).

L’Anses a évalué les Valeurs Limites d’Exposition Professionnelle sur 8h (VLEP-8h) de l’oxyde ferrique et du trioxyde de fer : 10 mg/m3 et 5 mg/m3 respectivement.

De nombreuses études in vitro montrent une potentielle application des nanoparticules d’oxyde de fer dans les traitements anticancéreux. Les études actuelles sur la biodistribution, la caractérisation et l’évaluation de leur toxicité ne permettent pas d’utiliser les nanoparticules d’oxyde de fer chez l’homme.

Présentation

Le fer (Fe), de couleur blanc argenté, est le quatrième métal le plus abondant dans la croute terrestre, à hauteur de 5%. Ce métal est ductile, malléable et unique par sa propriété magnétique.

Le fer, sous sa forme élémentaire, est assez rare dans la nature. C’est un élément très réactif qui s’oxyde rapidement en (INRS, 2008) :

  • oxyde magnétique (oxyde de fer II, III, Fe3O4, magnétite, de couleur jaune)
  • oxyde ferrique (oxyde de fer III, Fe2O3, hématite, de couleur rouge)
  • oxyde ferreux (oxyde de fer II, FeO, wustite, de couleur noire)

Il peut également se combiner avec d’autres composés comme le sulfate.

Le fer est aussi un minéral jouant un rôle essentiel à notre organisme. Il est notamment présent dans notre alimentation. Le fer ingéré est ainsi impliqué dans :

  • la synthèse de l’hémoglobine, protéine indispensable dans le transport de l’oxygène par les globules rouges
  • la synthèse de la myoglobine, protéine du muscle stockant l’oxygène
  • dans la production d’enzymes intervenant dans la respiration et la synthèse de l’ADN

Ainsi 70% du fer de l’organisme est associé à l’hémoglobine, on dit qu’il est sous forme « héminique », le reste étant sous forme « non héminique » (Anses).

Du fait de ses propriétés physico-chimiques, le fer et ses composés interviennent dans de nombreux autres domaines (Echa) :

  • l’industrie de chimie lourde (ammoniac, essence, lubrifiants, minerais)
  • l’industrie du bâtiment et des transports
  • l’industrie du textile, des peintures, des cosmétiques (pigments) et l’industrie agroalimentaire (colorants « E172 »)
  • l’imagerie médicale (produit de contraste pour la résonnance magnétique nucléaire)
  • l’environnement (purification de l’eau)
  • l’agriculture (insecticides)
  • l’industrie high-tech (composants électroniques)
  • Le fer dans l'environnement

    Comportement dans les différents milieux

    Air

    Très peu volatil, les concentrations de fer dans l’air sont minimes, allant de 50-90 ng/m3 à 1.3 µg/m3 en fonction de la qualité de l’air (urbanisation, pollution, industries). Près des usines productrices d’acier et de fer, les concentrations peuvent atteindre jusqu’à 12 µg/m3 (OMS, 2003).

    Eau

    Le fer et ses composés sont très peu solubles dans l’eau et sont souvent associés à des particules insolubles. Suite au lessivage des sols par les eaux de pluie, la concentration en fer est plus élevée et plus variable dans les eaux douces que dans l’eau de mer, avec en moyenne respective 50 et 10 mg/L (IRSN, 2002).

    Sols

    Le fer se retrouve dans le sol et notamment dans les sédiments sous formes d’oxydes minéraux complexes à des concentrations oscillant entre 4 à 100 mg/g. La formation d’oxydes minéraux dépend essentiellement du pH, de la teneur en argile et en matière organique (IRSN, 2002).

    Sources naturelles et liées à l’activité humaine

    La présence naturelle du fer dans les compartiments environnementaux est essentiellement due au lessivage des sols, avec dissolution des roches et minerais.

    Le fer et ses composés se retrouvent dans le milieu naturel via (ECHA)  :

    • Les rejets industriels, urbains et agricoles
    • La corrosion des canalisations métalliques
    • L’utilisation de sels ferriques dans le traitement des eaux

    L’usage des transports ferrés conduit également à la production d’oxydes de fer dans les enceintes de gare et de réseaux souterrains (Anses, 2015).

  • Exposition au fer

    Population générale

    Les personnes vivant près d’usines utilisant du fer ont plus de risque d’être exposées à des doses plus importantes que la population générale.

    Par ingestion

    Dans les aliments, le fer existe sous deux formes principales : héminique et non héminique. La viande rouge, la volaille, le poisson et les fruits de mer renferment du fer à la fois héminique et non héminique. Les fruits séchés, la mélasse, les grains entiers, les légumineuses, les légumes verts, les fruits à écales, les graines, les œufs et les produits laitiers renferment uniquement du fer non héminique. Notez que les produits laitiers contiennent très peu de fer et que, de plus, le calcium qu’ils contiennent concurrence le fer et pourrait nuire à son absorption.

    Le taux d’absorption moyen du fer héminique est d’environ 25 % (de 15 % à 35 %), tandis que celui du fer non héminique est d’environ 5 % (de 2 % à 20 %). La différence d’absorption est attribuable à la présence de certains composés dans les végétaux (acide phytique et tannins). La vitamine C, les protéines et le fer héminique améliorent l’absorption du fer non héminique.

    L’exposition au fer est principalement alimentaire. Le tableau ci-dessous présente quelques exemples d’aliments riches en fer. La table Ciqual de l’Anses (versions anglaise et française) est consultable en ligne et répertorie la composition nutritionnelle des aliments.

    Liste non exhaustive d’aliments contenant du fer obtenue à partir de la table Ciqual
    Aliments Teneur en fer (mg/100g d’aliment) Apports nutritionnels conseillés (ANC)
    Boudin noir 22,8 Homme et femme
    Chocolat noir 40% de cacao minimum 17,1 9 mg/jour
    Palourde 15
    Bigorneau 10,2
    Pain de mie multi-céréales 9,95 Femme non ménopausée
    Pâté de foie de volaille 9,19 16 mg/jour
    Germe de blé 8,59
    Pain complet 6,83
    Moules 5,47 Enfants
    Levure alimentaire 5 7 à 14 mg/jour
    Magret de canard 4,8
    Chocolat au lait 4,24
    Biscotte complète ou riche en fibres 3,1
    Pâte à tartiner chocolat et noisette 2,9
    Merguez 2,01

    Les produits carnés, les produits de la mer, les céréales et le chocolat figurent parmi les aliments les plus riches en fer. Néanmoins leur assimilation dans notre organisme est différente. Le fer contenu dans les produits carnés est 2,5 fois plus assimilable que celui contenu dans les végétaux.

    L’étude INCA2 rapporte que l’apport nutritionnel chez la femme et l’enfant se situent dans les recommandations prescrites, avec 11,6 mg/jour et 10 mg/jour respectivement ; chez l’homme, il a été évalué à 14,7mg/jour, soit  63% de plus (Anses).

    Les oxydes de fer sont également présents dans notre alimentation en tant que colorant « E172 » avec un apport journalier acceptable de 0-0,5 mg/kg poids corporel. Compte tenu l’état actuel des connaissances, l’ « E172 » ne présente pas de toxicité pour l’homme. Ils peuvent être utilisés dans les aliments comme dans les cosmétiques, à condition de satisfaire un certain degré de pureté (EFSA, 2015).

    La concentration en fer des eaux potables est d’environ 0,3 mg/L. Cette concentration peut augmenter si le fer est utilisé comme agents de coagulation dans les usines de traitements des eaux. L’eau de consommation apporte environ 0,6 mg de fer par rapport à l’apport journalier conseillé (OMS, 2003).

    Par inhalation

    L’inhalation de l’air extérieur apporte environ 25 µg/jour de fer et ses composés. Ces derniers font partie des particules fines ou ultrafines que l’on note PM.

    Travailleurs

    Les personnes travaillant dans les domaines de l’industrie de chimie lourde, l’industrie du bâtiment et des transports, l’industrie du textile, des peintures, des cosmétiques et agroalimentaire, l’imagerie médicale, l’environnement, l’agriculture et de l’industrie high-tech, sont beaucoup plus exposées au fer et à ses composés que la population générale. L’inhalation des poussières contenant des particules de fer devient alors la voie d’exposition principale. Les travailleurs peuvent également être exposés par contact cutané chronique et prolongé (INRS, 2008).

  • Toxicité du fer sur l'homme

    Les études traitant l’exposition chronique par voie orale de la population générale sont très limitées et ne permettent pas d’établir une toxicité sur la base des connaissances actuelles.

    Néanmoins, des études traitant une exposition chronique de l’air extérieur ont été conduites. Les études épidémiologiques ont été principalement réalisées sur des populations professionnellement exposées et notamment ceux travaillant dans les industries de sidérurgie ou dans les enceintes ferroviaires souterraines (INRS, 2008).

    Effets cancérogènes

    Dès 1990, le CIRC a classé deux activités professionnelles comme cancérogènes certains pour l’homme (Groupe 1) : l’extraction souterraine d’hématite comportant une exposition au radon et la production de fonte et d’acier. Les fumées de soudage ont également été classées dans le Groupe 1 (CIRC, 2012).

    La sidérose, le cancer broncho-pulmonaire primitif et la broncho-pneumopathie chronique obstructive entrainant un déficit respiratoire chronique peuvent être considérées comme des maladies professionnelles suite à une exposition prolongée au fer et à ses composés (tableaux 44 et 44 bis du régime général) (Anses, 2015, INRS tableau 44, INRS tableau 44bis).

    Néanmoins, l’effet cancérogène des oxydes de fer seuls reste encore flou en raison des co-expositions avec d’autres substances connus cancérogènes. De manière cohérente, l’effet cancérogène des oxydes de fer chez les animaux n’a pas été mis en évidence lorsqu’ils sont étudiés seul. Un effet cancérogène a été observé avec l’association de benzo[a]pyrène chez l’animal de laboratoire (INRS, 2008).

    Le fer dextran, utilisé pour traiter l’anémie, a été classé par le CIRC comme possiblement cancérogène pour l’homme (Groupe 2B). Quelques cas cliniques ont développé des sarcomes après injection de fer dextran. Les données chez l’animal montrent un développement de tumeurs au niveau du point de l’injection de fer dextran. Cependant ces données ne sont pas suffisantes pour considérer cette substance comme substance cancérogène avéré ou probable (CIRC, 1973).

    Quant au complexe fer-dextrine, également utilisé pour traiter l’anémie, il a été classé dans le Groupe 3 (inclassable quant à sa cancérogénicité pour l’homme) (CIRC, 1973).

    En 2013, le CIRC a également classé la pollution de l’air extérieur et les PM comme substance avérée cancérogène (Groupe 1) ; les PM étant les polluants associés le plus étroitement à une incidence accrue de cancers, en particulier du poumon. Un lien a également été établi entre la pollution de l’air et l’augmentation du nombre de cancers des voies urinaires et de la vessie (CIRC, 2013).

    Autres effets toxiques (uniquement pour une exposition chronique)

    Des études épidémiologiques concernant les PM présentent ces particules comme des facteurs de risques des maladies respiratoires et cardiovasculaires et diabète de type II.

    Un excès de fer entrainerait un désordre immunitaire et au sein de nombreux organes internes tels que le foie (cirrhose, carcinome hepatocellulaire) ou les reins (ischémie) (Dev, 2017). Un lien entre exposition prolongée aux PM et réduction de l’espérance de vie a également été montré. En Europe, trois pourcent des décès suite à des maladies cardiopulmonaires sont attribuables à l’exposition aux PM (OMS, 2013).

  • Gestion du risque lié au fer

    Aucune valeur toxicologique de référence (VTR) n’est disponible pour le fer et ses composés.

    Population de travailleurs

    En milieu professionnel, l’ANSES recommande plusieurs valeurs limites d’exposition professionnelle (VLEP) en fonction de l’état du fer (Anses, 2015).

    Ici seule la VLEP de l’oxyde ferrique et du trioxyde de fer ont été évaluées par l’Anses.

    Eléments VLEP-8h (en mg/m3)
    Oxyde ferrique 10
    Trioxyde de fer, fumées 5

    Les données concernant l’oxyde ferrique ont été complétées par la base de données Haz-map avec:

    • La « Threshold Limit Values » (TLV) qui correspond à la concentration dans l’air à laquelle la plupart des travailleurs peuvent travailler sans effet adverse : 5 mg/m3, fraction respirable
    • La « Permissible Exposure Limit » (PEL) qui correspond à la limite d’exposition permise : 10 mg/m3, fumée
    • L’ « Immediatly Dangerous to Life or Health » (IDLH) pour la concentration à laquelle un danger pour la vie/santé est immédiat : 10 mg/m3, fumée

    Le fer et ses oxydes de fer interviennent dans de nombreux procédés industriels. Le tableau ci-dessous présente les maladies professionnelles associées aux procédés industriels à risque.

    Eléments Maladies déclarées Procédés industriel à risque professionnel Classement CIRC
    Fer Asthme Extraction des métaux et raffinage
    Oxyde ferrique Pneumoconiose, cancer broncho-pulmonaire primitif Fumées de soudage Groupe 1
    Oxyde ferreux Pneumoconiose

    Sidérose

    Emaillage
    Oxyde magnétique

    Exposition environnementale

    Eau

    La directive européenne 98/83/CE du 03 Novembre 1998 et sa transposition en droit français par le décret n° 2001-1220 du 20 décembre 2001, transcrit en 2003 dans le Code de la Santé Publique, fixent comme référence une concentration en fer qui ne doit pas dépasser 0,2 mg/L dans les eaux de consommation humaine (Arrêté du 11 janvier 2007 relatifs aux limites et références de qualité des eaux brutes et es eaux destinées à la consommation humaine).

    Air

    La règlementation impose des valeurs limites pour les PM2,5 et PM10, qui sont détaillées dans la fiche Particules de l’air du portail www.cancer-environnement.fr.

  • Prévention du risque lié au fer

    Population générale

    Les effets sanitaires de la pollution atmosphérique augmentent en fonction des concentrations des substances polluantes dans l’air et du temps d’exposition. C’est la raison pour laquelle il est conseillé aux personnes sensibles (personnes âgées, enfants et personnes ayant des maladies respiratoires ou cardiovasculaires) de limiter leurs efforts physiques et leurs sorties en cas d’épisode de forte pollution (OMS, 2013).

    La réduction d’émissions de particules de fer et d’oxyde de fer est une affaire publique comme individuelle. Des mesures politiques peuvent être mises en pratique dans les villes par une amélioration des émissions des transports et des systèmes énergétiques et écologiques plus performants. De nombreuses études d’interventions et épidémiologiques font état d’améliorations de l’état de santé suite aux différentes mesures appliquées (Santé publique France, 2016).

    Travailleurs

    Les environnements où les travailleurs exercent leurs activités sont des « locaux à pollution spécifique ». Ces locaux doivent être adaptés avec des mesures de détection, d’aération et d’assainissement  mis en place par l’employeur pour la protection des ouvriers (INRS, 2012). Ainsi, les fumées de soudage doivent être captées à leur source d’émission. L’idéal est de mettre à disposition une cabine de soudage pour protéger complètement l’ouvrier des fumées.

    Autrement, différents moyens de prévention existent :

    • une aspiration mobile à la source,
    • une aspiration mobile associée à l’outil,
    • une hotte aspirante.

    Ce système de captage par aspiration est obligatoirement complété par un système de compensation d’air de la ventilation générale (Ministère du Travail).

  • Evolutions récentes

    De nombreuses études in vitro montrent une potentielle application des nanoparticules d’oxyde de fer dans les traitements anticancéreux. Les études actuelles sur la biodistribution, la caractérisation et l’évaluation de leur toxicité ne permettent pas, aujourd’hui, d’utiliser les nanoparticules d’oxyde de fer chez l’Homme (Patil, 2015).

    De ce fait, le Centre International de Recherche contre le Cancer (CIRC) a décidé de placer l’étude de cancérogénicité des oxydes de fer utilisés en compléments alimentaires et en biologie médicale comme une haute priorité pour les années 2015-2018 (CIRC, 2014).

Auteur : Département Prévention Cancer Environnement, Centre Léon Bérard

Relecture : Marie-Laure Bidondo, Ingénieur chimiste - métrologiste (Direction Santé Environnement - Santé Publique France)

Mise à jour le 16 août. 2022

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