Le cancer de la thyroïde, comme tous les cancers, est une pathologie multifactorielle. Il n’est donc pas possible de déterminer la cause exacte du cancer de la thyroïde chez un individu. Certains facteurs de risque environnementaux sont cependant avérés ou suspectés.
Il existe deux facteurs de risque avérés du cancer de la thyroïde : l’exposition (interne ou externe) aux rayonnements ionisants, et la carence en iode.
Les rayonnements ionisants
La thyroïde est connue pour être un organe particulièrement sensible aux rayonnements ionisants (on dit aussi que c’est un organe radio-sensible), surtout pendant l’enfance. L’exposition aux rayonnements ionisants peut être naturelle, médicale, ou accidentelle.
Le risque de développer un cancer de la thyroïde suite à ce type d’exposition dépend de la dose reçue et de l’âge, une exposition dans l’enfance exposant à un risque plus important de développer un cancer lorsque celle-ci a lieu avant l’âge de 10 ans.
A ce jour, aucune étude n’a jamais montré d’excès de cancer thyroïdien chez les sujets irradiés à l’âge de 40 ans ou après, ceci quelle que soit la dose de radiation reçue par la thyroïde.
L’exposition médicale
L’exposition aux rayonnements ionisants peut découler d’examens d’imagerie médicale (radiographie, etc.), ou de traitement par radiothérapie de certains cancers (InVS, 2010). A ce jour, l’association entre la dose de rayons reçus par les examens médicaux et le risque de cancer de la thyroïde n’est pas précisément définie. Il est donc recommandé de ne pratiquer des examens d’imagerie que lorsque cela s’avère indispensable, en particulier chez les enfants (Schonfeld, 2011).
La radiothérapie des cancers de l’enfant et de l’adolescent augmente le risque de cancer de la thyroïde (De Vathaire, 1999 ; Ron, 1995). Ces cancers, survenant après des doses modérées à fortes, commencent à apparaitre environ 10 ans après la radiothérapie, et l’augmentation se prolonge durant au moins 40 ans.
Les accidents nucléaires
C’est suite à des expositions dues à des accidents ou essais nucléaires qu’une augmentation de cas de cancers de la thyroïde a été constatée chez les personnes vivant à proximité des sites accidentés (accident de Tchernobyl, par exemple), trois ou quatre ans après l’accident (UNSCEAR, 2000 ; Cardis, 2011). Le risque de développer un cancer de la thyroïde est alors d’autant plus élevé que l’exposition a eu lieu à un âge précoce et que la distance entre le lieu de l’accident et l’exposition est réduite (UNSCEAR, 2000).
Dans le cas de ces expositions accidentelles, des particules radioactives sont rejetées dans l’atmosphère et émettent des rayonnements ionisants. Les populations avoisinantes et les personnes intervenant sur le lieu même de l’accident ont pu être exposées soit de manière externe (par dépôt de particules sur la peau), soit interne (par inhalation de particules, ou ingestion d’aliments ou boissons contaminés).
À ce jour, les seuls effets avérés concernent l’excès de cancer de la thyroïde chez les personnes vivant à proximité de la centrale de Tchernobyl au moment de l’accident, et exposées pendant l’enfance (Inserm, 2008). Des mesures préventives existent pour faire face aux conséquences de ces accidents : en absorbant des comprimés d’iode stable (iodure de potassium, non radioactif), celui-ci se fixe dans la thyroïde et empêche la fixation de l’iode radioactif libéré par l’accident.
Cette mesure permet de diminuer le risque de développer un cancer de la thyroïde suite à une exposition aux rayonnements ionisants. Les essais nucléaires peuvent augmenter le risque de cancer de la thyroïde. En Polynésie Française, la seule étude réalisée à ce jour a conclu à attribuer environ 5 à 10% des cancers de la thyroïde aux essais atmosphériques réalisés par la France (De Vathaire 2010).
Il convient de rappeler que ce type d’exposition est uniquement accidentel et ne correspond en aucun cas à une exposition naturelle aux rayonnements ionisants.
Cancers thyroïdiens en France et accident de Tchernobyl
Voir aussi la rubrique « Vos Questions : Que sait-on des liens entre cancer de la thyroïde et Tchernobyl ».
Depuis 2000, l’Institut de veille sanitaire (InVS, aujourd’hui Santé Publique France) pilote une démarche nationale pluridisciplinaire sur les éventuelles retombées sanitaires en France de l’accident de Tchernobyl, survenu en 1986.
Les régions de l’Est de la France ont été en moyenne 8 à 10 fois plus exposées que celles de l’Ouest, mais 100 fois moins que la Biélorussie (InVS, 2010). L’InVS s’est intéressé aux cancers thyroïdiens, avec une épidémie d’abord chez l’enfant et actuellement chez les jeunes adultes.
L’augmentation de l’incidence des cancers de la thyroïde en France est ancienne et continue depuis 1975 (InVS, 2010). Elle a donc commencé avant 1986 et ne semble pas s’être accélérée après cette date. Cette augmentation est plus importante dans les registres français de certains départements de l’ouest, peu ou pas contaminés.
De plus, l’augmentation de l’incidence du cancer de la thyroïde est constatée dans la plupart des pays d’Europe de l’Ouest, mais aussi aux Etats-Unis (augmentation très similaire à celle de la France), non touchés par cet accident ; à l’inverse, elle n’est pas plus importante dans les pays qui ont été plus fortement exposés aux retombées de l’accident (Autriche, Bulgarie, Grèce).
Il semble donc peu plausible que l’accident de Tchernobyl ait provoqué un excès de cas de cancers de la thyroïde dans la population française.
Pour s’en assurer, et étant données les incertitudes persistant sur l’effet des faibles doses, une étude cas-témoins a été réalisée par l’InVS et l’Inserm sur 1000 sujets jeunes atteints d’un cancer thyroïdien, vivant dans l’est de la France et ayant moins de 15 ans au moment de l’accident de Tchernobyl. Les résultats sont actuellement en cours d’analyse.
La carence en iode
L’iode est un oligo-élément essentiel pour le corps humain. Sa principale source est l’alimentation (produits venant de la mer, produits laitiers et céréaliers, etc.). Il intervient dans la production des hormones thyroïdiennes. La carence en iode a donc pour conséquence une diminution de la synthèse hormonale de la glande thyroïde. Il en découle une stimulation de cette synthèse qui se traduit par une prolifération compensatoire de la thyroïde.
La carence en iode est un facteur de risque avéré de goitre (augmentation de volume de la thyroïde), et peut conduire lorsqu’elle est sévère à une hypothyroïdie. Elle est indirectement associée au risque de survenue d’un cancer dans la mesure ou des antécédents personnels de goitre augmente le risque de survenue d’un cancer thyroïdien.
La supplémentation iodée entraîne surtout une modification de la distribution des cancers sans modification réelle de l’incidence.
Par contre, la thyroïde carencée présente une forte avidité pour l’iode, ce qui majore la dose absorbée et le risque de cancer induit par une exposition interne aux rayonnements ionisants (Cardis, 2005). L’OMS recommande l’iodation universelle du sel, c’est-à-dire l’utilisation de sel iodé pour l’alimentation humaine et animale afin de prévenir ou de combattre la carence en iode. C’est la stratégie utilisée par de nombreux pays.
Les apports nutritionnels conseillés en iode sont de 150 µg par jour pour un adulte, et de 200 µg par jour pour une femme enceinte ou allaitant (Afssa – aujourd’hui Anses-, 2009).